Intérêt de la robotique chirurgicale da Vinci en pédiatrie

clip_image002

Robot chirurgical Da Vinci

Consulter le pdf de cet avis du CEDIT: Avis du CEDIT – robot en pédiatrie

Résumé:

La diffusion des robots chirurgicaux dans les pays développés se fait aujourd’hui à un rythme soutenu. L’AP-HP, en tant que centre d’excellence pour les soins, la recherche et la formation des futurs chirurgiens, se doit d’étudier ce nouveau développement des techniques chirurgicales.

Dans ce cadre, le secrétariat scientifique du CEDIT a réalisé un état des lieux et une évaluation de la valeur de cette technique dans son utilisation pédiatrique, prenant en considération les aspects pertinents pour l’institution (aspects techniques, médicaux, médico-économiques, organisationnels, etc.)

Cette évaluation, détaillée dans le présent article, conclut que l’utilisation du robot en pédiatrie est encore peu validée scientifiquement, avec peu de preuves médicales et médico-économiques. Son acquisition à l’AP-HP est une opportunité pour participer au développement et à la validation scientifique de cette technologie de santé.

Le Secrétariat Scientifique du CEDIT a réalisé une synthèse des éléments disponibles fin 2013 sur l’intérêt de l’utilisation du robot chirurgical da Vinci en pédiatrie, technique qui s’étend  en France et dans l’ensemble des pays développés.

Du point de vue technique, les robots chirurgicaux permettent une réalisation « plus aisée » d’un geste laparoscopique, en simplifiant le geste chirurgical et en apportant une qualité de visualisation (stéréoscopique) supérieure à celle des endoscopes chirurgicaux actuels. Leur utilisation suppose des moyens techniques et la satisfaction de contraintes souvent présents d’emblée dans les blocs opératoires récents. L’implantation d’un robot chirurgical suppose aussi une formation spécifique de l’équipe chirurgicale (deux chirurgiens seniors, panseuse, instrumentiste et aides-soignants) et le franchissement d’une courbe d’apprentissage dont l’expérience, évaluée chez l’adulte, a montré qu’elle pouvait être longue.

Les robots disponibles, développés pour la chirurgie d’adulte, présentent quelques inadaptations à la chirurgie de l’enfant : si des instruments de petit diamètre ont été développés, ils n’offrent pas encore les mêmes avantages que les instruments standards.

L’évaluation des résultats cliniques de la chirurgie robotique pédiatrique n’a dépassé le stade de la faisabilité que dans quelques indications de chirurgie viscérale (digestive et urologique), et a été comparée à la chirurgie à ciel ouvert[1], pratique plus répandue que la cœlioscopie en Amérique du Nord, d’où émane la majorité des publications.

La littérature disponible a un niveau de preuve faible. Elle suggère, sans démonstration rigoureuse, que la chirurgie robotique nécessite des temps opératoires plus longs que la chirurgie à ciel ouvert, mais qu’elle pourrait permettre un raccourcissement des durées de séjour postopératoire (de l’ordre de la journée). Une diminution de la douleur postopératoire est suggérée par quelques études. Les résultats annoncés ne permettent pas de supposer que la sécurité ou la qualité des résultats chirurgicaux soit améliorée. De même, les quelques données disponibles ne permettent pas de mettre en évidence de différences entre les résultats de la chirurgie robotique et de la chirurgie laparoscopique.

La littérature est pauvre en termes médico-économiques. Les surcoûts sont mal établis mais probablement importants, que l’on compare la chirurgie robotisée à la chirurgie à ciel ouvert ou à la chirurgie laparoscopique. La réduction des durées de séjour induite par la chirurgie robotisée par rapport à la chirurgie à ciel ouvert, évoquée dans certaines études, pourrait réduire ces surcoûts. Toutes choses égales par ailleurs, la seule manière de diminuer le coût unitaire d’une intervention robotisée est de diminuer son coût fixe, en augmentant l’activité chirurgicale totale.

D’un point de vue organisationnel, l’utilisation du robot devrait être planifiée et répartie entre les équipes utilisatrices. Le partage du robot entre deux ou plusieurs sites permettrait un accès plus large des praticiens de l’AP-HP à cet équipement, mais ralentirait l’apprentissage de chacune des équipes, sauf à augmenter les plages horaires d’utilisation du robot (avec des conséquences au-delà des blocs opératoires). Il est important également d’estimer le bassin de population pouvant avoir accès à la chirurgie robotisée.

Notre analyse des données disponibles n’a pas mis en évidence de spécificité de la robotique chirurgicale pédiatrique sur le plan juridique ou réglementaire.

Il découle de la présente analyse que les informations disponibles sur les résultats médicaux et médico-économiques de la chirurgie robotisée en pédiatrie sont incertaines. L’implantation d’un premier robot dans un hôpital pédiatrique répond à une logique de progrès, d’apprentissage technique, et vraisemblablement de développement de recherches académiques. Cette implantation devrait être accompagnée d’un projet prospectif d’évaluation comparative des diverses techniques chirurgicales, à court et à moyen terme, afin d’acquérir les connaissances nécessaires à l’amélioration de cette technique prometteuse.

[1] Il faut noter que la chirurgie à ciel ouvert a conservé en chirurgie pédiatrique des indications de gestes devenus laparoscopique chez l’adulte, la petitesse du champ opératoire rendant certains abords laparoscopiques difficiles ou impossibles.